Les contributeurs forcés de ChatGPT se rebellent

L’intelligence artificielle ne serait rien sans la contribution involontaire de tous ceux qui la nourrissent de leur travail : les journalistes et les écrivains fournissent contre leur gré des documents, des textes, des informations qui composent le matériau indispensable dans lequel puise, en dehors de tout cadre légal, le logiciel ChatGPT. Cette somme gigantesque de connaissances est certes recomposée artificiellement par le robot mais sans aucune contrepartie et sans aucune considération de la réglementation sur le droit d’auteur. Une nouvelle zone de non droit s’est créée qui suscite des débats juridiques inédits.

robot

« Le quotidien américain New York Times a lancé mercredi 27 décembre des poursuites, auprès d’un tribunal de New York, à l’encontre d’OpenAI, créateur du logiciel ChatGPT, ainsi que de Microsoft, son principal investisseur, pour violation des droits d’auteur. »

Le Monde avec AFP, 27 décembre 2023.

En septembre dernier, un groupe de célèbres auteurs américains, associés à l’organisation syndicale la Guilde des auteurs, avaient aussi porté plainte contre OpenAI, la start up à l’origine du robot générateur de textes ChatGPT.

«  Au cœur de ces algorithmes se trouve un vol systématique à grande échelle » d’œuvres de l’esprit, assènent les avocats. « Les auteurs doivent pouvoir décider si leurs livres peuvent ou non servir à entraîner des IA. Et s’ils le choisissent, ils doivent être correctement rémunérés », déclare l’écrivain Jonathan Franzen.

Chloé Woitier, « Plusieurs auteurs, dont le créateur de Game of Thrones, attaquent OpenAI », Le Figaro, 21 septembre 2023.

Les agences de presse, les associations d’auteurs, les dessinateurs sont eux aussi concernés par l’utilisation non réglementée de leurs productions. Ils savent que leur combat s’inscrit dans une configuration juridique nouvelle : comment identifier les éléments originaux issus de multitudes d’oeuvres dont le contenu a été recomposé par la machine ? Les notions d’originalité et de plagiat devront sans doute être redéfinis et les limites du droit d’auteur repensées afin de préserver la créativité humaine sans laquelle le robot, aussi élaboré soit-il, ne serait rien.

L’apparition et le développement de l’internet avaient déjà laissé croire à une zone de non droit où chacun pouvait s’imaginer libre de puiser à volonté. Avec les avancées fulgurantes de l’intelligence artificielle, un nouveau champ juridique s’ouvre : pour inventer une économie de la propriété intellectuelle, capable de protéger les intérêts des créateurs face aux performances technologiques qui semblent les dépasser tout en en étant les débiteurs.

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